Concerts entre deux confinements

Ce n’est pas du jazz c’est de la musique ! J’ai vu le concert de Michel Portal hier soir dimanche à la Philharmonie en direct sur Internet. Projection sur grand écran et sono de studio chez moi. La vieillesse est annulée au profit de la beauté éternelle de la musique. Ne jamais se décourager quand on à la chance de jouer de la musique. Les douleurs et les doutes ne sont que détails mineurs. Portal est à l’Europe ce que Rollins est aux USA : une émotion radicale portée par des types hyper âgés, Portal 85 ans, idem Sonny Rollins, 90 ans, je l’avais vu il y a 5 ans dans un concert absolument merveilleux : énergie incomparable, renversante, miraculeuse. Quand j’étais jeune ils étaient mes modèles, maintenant que les années ont passées, j’ai mal partout je me sens vieux, je suis découragé et ils me redonnent le goût de vivre. Ce sont des chamans guérisseurs, des maitres en musique. Portal a abandonné ses dernières angoisses. Il ne livre plus que de l’émotion pure, beauté incandescente de la vie sublimée en musique. Héritage fabuleux pour les générations futures : la dissolution du jazz dans la musique classique ou la dissolution du classique dans la jazz. Improvisation ou écriture semblables : rigueur et modestie. Incomparable informel. Formel sans limite à l’aventure quoiqu’il arrive. Il y a encore des gens sérieux qui font bien leur boulot en France. Cette retransmission sur Internet du Festival de Jazz de la Villette était parfaite. Techniquement équivalente à des trucs qui intéressent un public un million de fois plus important. J’avais souvent des micros coupures du son du à la mauvaise qualité de mon débit Internet personnel. Ces micro coupures énervantes rappellent que l’on n’est pas dans la salle. Je hais les dimanches. Avant le Covid 19 je n’aurais jamais assisté à un concert par le biais de la technologie en direct. Maintenant c’est le masque dans la salle ou l’écran chez soit ! Masque ou écran c’est pareil ! Le seul truc chiant est de ne pouvoir additionner ses applaudissements à ceux du publique, d’être tout seul chez soi comme un con… J’ai pleuré presque tout le temps tellement j’étais ému. J’ai picolé du vin blanc pendant tout le concert, ce qui est absolument contraire à une hygiène pour vivre vieux. Portal donne un sens au changement de siècle par sa musique. Vraiment formidable.

CONCERT À ROSELYNE – MOBILISATION POUR LE SPECTACLE VIVANT ce mercredi Place du Palais Royal devant le conseil d’état à un jet de pierre du ministère de la culture. Programme à 16 heure dans la rue : VA PENSIERO – Verdi {Roselyne aime tant l’opéra} / SARABANDE – Haendel {Requiem pour le Spectacle Vivant tout le monde allongé mort} LE DESERTEUR – B. Vian {Les Paroles détournées : Nous étions il y a peu / Confinés, démunis / Mais voici l’agonie / On meurt du couvre-feu } BELLA CIAO Plus une batucada à faire vibrer les fenêtres de la ministre et une ou deux improvisations. Jouer avec des coups de vent imprévisibles et chanter avec le masque : expérience limite. Retour de quelques copains de l’orchestre Debout comme Grégoire Letouvet à la manoeuvre … Les intermittents du spectacle se mobilisent

Hommage à John Giorno décédé l’année passée, immense poète dont l’oeuvre était teintée de rock and roll. Joel Hubaut au Fest « Extra » à Beaubourg. Une pulsation bombardée à 105 BPM d’un pied de boite à rythme cardiaque pendant 50 minutes. En cette période de crise, j’avais l’impression d’entendre en téléportation au Musée Beaubourg le groupe Public Image ltd augmenté du groupe No Wave de Giorno du début des 80’ tout ça dans la seule magie d’une voix solo accompagné par un musicien ingé-son efficace. Emotion brutale et vertige poétique du No Future. Joel Hubaut pendant toute sa longue carrière a développé l’idée d’épidémie en peinture et poésie. Autant dire qu’il sait de quoi il hurle. Il a donné une de ses plus belles performances ce soir. Vraiment génial ! Contagion générale du grossiste en art en cadence avec un delay-echo au rythme implacable d’une syncope statique en boucle hypnotique. Ensuite je suis rentré dare-dare me coucher.

Avant hier, dimanche après-midi au Parc de la Villette. Le SPAT sonore Nicolas Chedmail (spatsonore.fr) invitait Denis Charolles (musiques à ouïr, percussions), Julien Eil (sax, clarinette basse), Jean-Brice Godet (clarinette basse) Jean-Jacques Birgé (électronique de poche) Musique 100% informelle. Performance soutenue par la ville de Paris pour « cet été particulier » non loin il y avait aussi le festival « Constellations : Villette Makerz, laboratoire collaboratif » des groupes de jeunes qui jouaient une bonne musique post bop tout l’après-midi sur une scène près du Canal de l’Ourcq, j’ai écouté deux ou 3 morceaux du « Zoot Octet » et je suis retourné à mon marasme « je hais les dimanches ». Le SPAT sonore est divertissant, original et créatif. Des instruments dans les arbres, un vélo tire une charrue sonore qui laboure les pavés en gémissant, un autre vélo distribue des baffes à des casseroles. Free Music pour parc et jardins, relecture de John Cage pour faire marrer les enfants. Le soir à l’autre bout du parc il y avait le grand Michel Portal qui se produisait à la Philarmonie diffusée en direct sur Internet. Ce début de mois de septembre donnait un sentiment de reprise des activités musicale à Paris après la catastrophe Covid 19. Tant mieux !

Fatoumata Diawara en direct sur Internet de Jazz à la Villette à la Philharmonie. Grande dame de la musique d’Afrique de l’Ouest elle défend les femmes et le Mali dans une situation difficile. Grande chanteuse, bon groupe, bonne vidéo mais cette fois la retransmission internet était trop mauvaise : des coupures toutes les 5 secondes dues à mon fournisseur de Box. Il y avait en même temps le match Marseille PSG et le flux internet sert automatiquement les trucs commerciaux. Le flux musical s’en trouvait perturbé, je n’ai pu aller au bout du concert parce que le magnifique rythme africain était transformé et rythme de robot cassé. Ca arrive souvent. Le flux internet est très inégaliatire à l’image de la société. La 5G n’arrangera rien. Rien ne vaut un concert live. Mais pour une musique festive comme celle de Diawara, les gens étaient tétanisés immobiles avec leur masques et obligation d’avoir le cul collé à sa chaise.